Un contribuable fiscalement considéré comme agent immobilier professionnel participait depuis 2001 à une société simple, transformée par la suite en une société en nom collectif et inscrite au registre du commerce du Canton de Schwytz le 19 février 2009. Dans le cadre d’un contrat de transfert de patrimoine, la société en nom collectif a procédé, le 17 décembre 2009, à un transfert rétroactif au 1er juillet 2009 (valeurs comptables) de l’intégralité des actifs et passifs de la société en nom collectif au profit d’une SA préalablement créée. Le patrimoine ainsi transféré se composait de quatre appartements en propriété par étage, de quatre emplacements de parking souterrain et d’actions de deux autres sociétés anonymes (quatre de chaque société).
Suite au transfert de patrimoine, l’administration cantonale du Canton de Schwytz a calculé, pour le contribuable, un revenu issu d’opérations immobilières professionnelles d’un montant de 238 477 CHF et a établi, pour l’année fiscale 2009 et dans le cadre de l’impôt direct, l’assiette sur la base d’un revenu de 401 500 CHF. L’administration a motivé sa décision par le fait que le transfert de patrimoine de la société en nom collectif à la société anonyme constituait certes une restructuration d’une société de personnes en une personne morale, mais que les valeurs patrimoniales transférées ne constituaient pas une exploitation ou une partie distincte d’une exploitation au sens de l’art. 19 al. 1 let. b LIFD, raison pour laquelle les réserves latentes devaient être imposées.
Le Tribunal fédéral distingue, dans ses considérations, le terme d’activité lucrative indépendante du terme d’exploitation qu’il décrit comme étant un ensemble organisationnel et technique de valeurs patrimoniales constituant une unité organique et relativement indépendante en matière de fourniture de prestations entrepreneuriales. Le tribunal constate que le terme d’activité lucrative indépendante est, dans le cadre de la législation actuelle également, plus étendu que celui d’exploitation qui nécessite une unité organisée de travail et de capitaux. Cette interprétation se montre déjà, selon lui, dans l’art. 18 al. 1 LIFD qui définit, outre les revenus provenant d’une exploitation (commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou sylvicole) et de l’exercice d’une profession libérale, tous les revenus provenant «de toute autre activité lucrative indépendante» comme étant imposables. Il poursuit par conséquent en indiquant que tout exercice d’une activité lucrative indépendante n’est pas nécessairement lié à une exploitation.
Le Tribunal constate que l’administration de biens immobiliers propres ne présente les caractéristiques d’une exploitation qu’à titre exceptionnel. Selon lui, une telle exploitation présuppose une gestion immobilière professionnelle. Il est d’avis qu’on ne peut toutefois parler d’une exploitation que lorsque l’administration ne se limite pas aux transactions d’ores et déjà liées à un simple placement de capitaux d’une entreprise immobilière. Il indique qu’il est impossible de se ranger à l’opinion selon laquelle l’exigence de l’exploitation posée à une restructuration fiscalement neutre est également d’emblée satisfaite pour chaque activité lucrative (principale ou secondaire) indépendante dans le domaine des opérations immobilières.
Étant donné que le contribuable ne présentait ni un grand nombre d’immeubles ni une gestion immobilière faisant intervenir de propres services dépassant le cadre de la simple administration, le Tribunal fédéral a nié la présence d’une restructuration juridique dans le cadre de la notion d’exploitation.
Le Tribunal fédéral justifie également les exigences accrues en termes de restructuration fiscalement neutre d’entreprises de personnes en personnes morales par le fait que de telles transactions s’accompagnent régulièrement d’un transfert de fortune commerciale en fortune privée (participation à la personne morale). Le tribunal ne précise malheureusement pas si les exigences quantitatives (par analogie) applicables à la gérance des immeubles en vertu de la circulaire no 5 de l’AFC (du 1.6.2004), art. 4.3.2.8, doivent être remplies dans tous les cas. En tout état de cause, il est conseillé de faire examiner au préalable toute restructuration par les autorités fiscales afin d’éviter toute surprise.
Art. 19 al. 1 let. b et art. 18 al. 1 LIFD
(TF., 24.05.16 {9C_390/2015}, Martin Byland, lic. iur. avocat, TBO Treuhand AG, Zurich)