La Swiss GAAP RPC 14 «Comptes consolidés des compagnies d’assurance» a été profondément remaniée dans son contenu. La recommandation «Présentation des comptes des compagnies d’assurance», actuellement mise en consultation, s’insère sur le plan conceptuel dans la structure modulaire des Swiss GAAP RPC. Elle répond aux exigences des différentes parties prenantes et offre aux compagnies d’assurance à rayonnement national une norme comptable reconnue.1
La Commission de la Fondation pour les recommandations relatives à la présentation des comptes (RPC) a décidé de la mise en consultation de la version remaniée de la Swiss GAAP RPC «Présentation des comptes des compagnies d’assurance»,2 lors de sa dernière réunion du 5 décembre 2017. En fonction des résultats de cette mise en consultation, la Commission décidera (probablement) lors de sa réunion du 12 juin 2018 ou du 4 décembre 2018 de l’issue du remaniement de cette norme.
Ce remaniement répond à la décision de la Commission du 14 décembre 2014 d’abroger la version actuelle de la Swiss GAAP RPC 14 «Comptes consolidés des compagnies d’assurance» en vigueur depuis 2002. Cette décision a été prise sans qu’aucune date définitive pour l’abrogation n’ait été définie. La Commission était cependant consciente que l’abrogation toucherait non seulement les utilisateurs de longue date de la Swiss GAAP RPC 14 mais aussi les entreprises d’assurance organisées sous forme de coopérative qui sont tenues depuis 2015, avec l’introduction du nouveau droit comptable,3 d’utiliser une norme comptable reconnue au sens de l’Ordonnance du Conseil fédéral suisse.4 Afin de mettre à l’avenir à disposition des anciens tout comme des nouveaux utilisateurs une norme reconnue pour la présentation des comptes des compagnies d’assurance, laquelle devra servir d’alternative aux normes internationales de présentation des comptes, la Commission a décidé, lors de sa réunion du 17 juin 2015, de confier le remaniement de la Swiss GAAP RPC 14 à un groupe de travail. Outre les trois auteurs, des représentants de toutes les parties prenantes en font partie.
Contrairement à la norme internationale IFRS 17, publiée en mai 2017, qui traite exclusivement des dispositions de présentation des comptes des contrats d’assurance, la Swiss GAAP RPC 14 restera toujours, même dans sa version remaniée, une norme axée sur les principes d’établissement des comptes des entreprises d’assurance. Compte tenu de la vocation de cette norme et le fait qu’elle s’adresse aux compagnies d’assurance à rayonnement national, il a été décidé, dans le cadre de son remaniement, de renoncer à imposer des instructions détaillées en ce qui concerne l’évaluation des provisions techniques. Le projet permet en revanche pour ce qui concerne l’évaluation et l’inscription au bilan des provisions techniques de continuer à se référer aux prescriptions réglementaires. Afin de créer un degré de transparence plus élevé en matière de technique d’assurance, qui convienne aux parties prenantes, le projet exige des publications plus importantes par rapport à la version actuelle encore en vigueur. Par ailleurs, une évaluation aux valeurs actuelles est désormais priorisée pour les placements de capitaux; une évaluation aux valeurs historiques n’est autorisée, comme c’était déjà le cas auparavant, que dans des cas exceptionnels. La recommandation remaniée qui intègre les dispositions spécifiques de consolidation dans une section séparée s’appliquera dans son intégralité à tous les utilisateurs de la Swiss GAAP RPC 14, indépendamment de leur taille.
Évaluation et présentation des placements de capitaux: Comme précisé précédemment, une évaluation aux valeurs actuelles est priorisée dans le projet, cela signifie que les placements de capitaux doivent être inscrits au bilan de préférence à leur valeur de marché. Dans le cadre d’un modèle hiérarchique à trois niveaux, une évaluation aux valeurs historiques n’est autorisée que dans des cas exceptionnels. L’obligation de publication des valeurs historiques lorsqu’on se réfère aux valeurs actuelles dans le bilan est dès lors supprimée. Nonobstant la priorisation des valeurs actuelles introduite, le droit d’évaluer les placements de capitaux à intérêts fixes selon la méthode d’amortissement des coûts est maintenu. Pour structurer la présentation, neuf catégories de placements ont été définies dans lesquelles les placements de capitaux doivent être désormais répartis et des informations doivent être publiées pour chaque niveau. Des obligations de publication nouvellement introduites concernent en outre l’utilisation de dérivés et les principes et hypothèses retenus pour l’évaluation aux valeurs actuelles.
Réserve de réévaluation ou dépréciations de valeur: Afin de se conformer à l’horizon de placement des compagnies d’assurance généralement à long terme, le concept appliqué jusqu’à présent de la réserve de réévaluation (RR), qui fait partie des capitaux propres, a été maintenu. Pour les placements de capitaux évalués aux valeurs actuelles, les plus-values et moins-values par rapport aux valeurs d’acquisition doivent être imputées à la réserve de réévaluation sans effet sur le résultat. Ces plus-values ou moins-values ne seront inscrites au compte de résultat qu’au moment de la réalisation des placements. Toutefois, les moins-values doivent être créditées après douze mois au plus tard à la réserve de réévaluation et enregistrées dans le compte de résultat en tant que dépréciation. Pour les placements de capitaux à revenus fixes, il y a lieu d’enregistrer immédiatement une dépréciation au compte de résultat si le remboursement intégral à la date d’échéance ou si le paiement des intérêts est menacé. S’il n’existe plus de motif de dépréciation, la dépréciation doit être dissoute. Dans le cadre des prescriptions citées, une compagnie d’assurance doit déterminer elle-même la procédure en matière de dépréciation et la présenter dans ses principes d’établissement des comptes. Une application et une présentation conséquente sont ici exigées.
Évaluation: Comme indiqué en préambule, il a été renoncé d’imposer des instructions détaillées en matière d’évaluation des provisions techniques. En principe, les provisions techniques doivent correspondre à la somme des prestations de sinistres futures attendues et plus particulièrement pour les entreprises d’assurance vie à la somme des valeurs des engagements contractuels. En même temps, l’évaluation doit garantir que les engagements d’assurance puissent être honorés en tout temps avec une sécurité suffisante. Afin de concilier les deux principes d’évaluation, il est permis de compléter les valeurs attendues des provisions techniques au bilan par la constitution de provisions de fluctuations et de sécurité. Tandis qu’une présentation explicite de ces provisions n’est pas exigée, la variation du montant des provisions de fluctuations et de sécurité doit désormais être présentée.
Publication: Par rapport aux dispositions sommaires relatives à l’évaluation des provisions techniques, les exigences applicables pour la présentation en la matière ont été revues à la hausse. Outre la description des méthodes et modèles utilisés, une indication sur la prise en compte des fluctuations aléatoires et le risque de paramètre est par exemple exigée. Les principales hypothèses et incertitudes qui y sont associées doivent également être publiées et expliquées. Par ailleurs, la manière dont l’entreprise définit le niveau suffisant de ses provisions techniques, les bases des hypothèses (orientation sur les prescriptions réglementaires ou sur des attentes proches du marché; pertinence d’expériences faites dans le passé ainsi que des changements attendus sur les évolutions observées) et l’origine des hypothèses (propres données statistiques, informations statistiques de la branche, informations basées sur des modèles stochastiques ou une combinaison de celles-ci) doivent être indiquées. Dans les activités de l’assurance vie, les indications relatives aux risques biométriques, au risque de résiliation et à un éventuel risque de taux d’intérêt garantis doivent être publiées. Dans les activités de l’assurance non-vie, les indications relatives aux méthodes actuarielles utilisées doivent être publiées. En ce qui concerne l’actualisation des provisions techniques, les hypothèses et paramètres retenus doivent être expliqués et présentés dans l’annexe. Enfin, les méthodes et hypothèses retenues pour la détermination des frais d’acquisition activés et la validation de leur valeur au bilan doivent également figurer.
Structures du bilan, du compte de résultat et du tableau de flux de trésorerie: Pour limiter dans la mesure du possible les restructurations complexes sur le plan administratif pour les utilisateurs de la Swiss GAAP RPC 14, les structures du bilan, du compte de résultat et du tableau de flux de trésorerie5 ont été calquées lors du remaniement sur les prescriptions réglementaires correspondantes de l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA). Par conséquent, on ne distingue plus comme jusqu’à présent le compte de résultat technique et le compte de résultat non technique, mais le résultat d’exploitation et le résultat hors exploitation ou exceptionnel. Cela permet non seulement d’éviter des restructurations mais aussi de se rapprocher des autres recommandations Swiss GAAP RPC. Les indications concernant les différentes branches d’assurance, telles que la répartition des primes brutes, font partie des obligations de mention ou sont implicitement exigées dans le cadre des comptes consolidés par les dispositions complémentaires concernant le rapport sectoriel. Dans la structure minimale du bilan est prévue une présentation brute des provisions techniques accompagnée par une activation de la part des réassureurs.
Publications dans le cadre des comptes consolidés: Il est prévu que la recommandation remaniée puisse être appliquée de la même manière par toutes les compagnies d’assurance indépendamment de leur taille ou d’autres critères. Il s’agit ainsi d’éviter de devoir introduire de nouveaux critères de taille ou des critères divergents de ceux du nouveau droit comptable (titre trente-deuxième du code des obligations). Cependant, certaines obligations de mention ont été affectées sciemment aux dispositions complémentaires des comptes consolidés afin d’accommoder les petits utilisateurs qui n’établissent en règle générale que des états financiers individuels. Il s’agit essentiellement de la présentation du taux d’actualisation pondéré moyen appliqué pour le calcul des provisions techniques par monnaie significative et, en lien avec la présentation des provisions pour prestations d’assurance dans l’activité d’assurance non-vie, des données à présenter concernant les charges de sinistres pendant une période d’observation de dix ans, ainsi que des indications complémentaires relatives à la procédure de liquidation.
Rapport sectoriel comme partie des comptes consolidés: Pour le compte de résultat des comptes consolidés, des dispositions complémentaires axées sur le principe de Management Approach qui s’applique déjà dans la Swiss GAAP RPC 31 ont été introduites. Ainsi les comptes sectoriels utilisés pour la gestion de l’entreprise seront à l’avenir déterminants pour le rapport sectoriel à présenter. À ce propos, au minimum un rapport sectoriel sur les domaines d’activité de la société, dans le cas où ils sont significatifs, comme la non-vie, la vie, la réassurance et la gestion de fortune devra être présenté.
Fonds pour participations futures aux excédents: La nouvelle position «Fonds pour participations futures aux excédents» a été introduite dans la structure minimale du bilan. Elle s’adresse en particulier aux entreprises d’assurance organisées sous forme de coopérative qui allouent une partie des excédents réalisés à leurs preneurs d’assurance. Cette participation des preneurs d’assurance au bénéfice réalisé qui va au-delà des participations aux excédents contractuelles ou légales constitue, selon l’avis courant et selon la pratique observée jusque-là, une distribution du bénéfice à comptabiliser sans effet sur le résultat. La position «Fonds pour participations futures aux excédents» doit permettre de créer à l’avenir une délimitation claire sur les plans terminologique et matériel par rapport aux provisions constituées pour la participation aux excédents créditée ou future. Le principe de présentation des comptes utilisé ainsi que les valeurs et la variation de cette position du bilan doivent être indiqués dans l’annexe.
Option pour éviter les incongruences dans le cadre de la consultation: le remaniement de la Swiss GAAP RPC 14 indique explicitement que les éventuelles modifications de valeur concernant les provisions techniques doivent être comptabilisées dans le compte de résultat avec incidence sur le résultat. Cependant, une évaluation des placements de capitaux (à revenus fixes) et des provisions techniques aux valeurs actuelles ferait apparaître des incongruences d’évaluation désignées par «Accounting Mismatch», car la variation des capitaux de placement serait comptabilisée sans effet sur le résultat dans la réserve de réévaluation,6 et, en revanche, avec effet sur le résultat dans le compte de résultat. Le groupe de travail a élaboré une proposition qui autoriserait à comptabiliser les variations induites par les taux d’intérêts des provisions techniques dans la réserve de réévaluation. La Commission ne voit aucune raison, au vu du cercle d’utilisateurs à rayonnement national des Swiss GAAP RPC, d’intégrer une telle option dans la recommandation remaniée. En même temps, elle s’intéresse à l’avis du public sur ce sujet de sorte que ladite proposition a été incluse dans les questions de la consultation à débattre.
- approche réglementaire indépendante de la taille;
- placements de capitaux – évaluation et publication;
- réserve de réévaluation / dépréciation de valeur;
- provisions techniques – évaluation et publication;
- structure du compte de résultat;
- publications complémentaires en ce qui concerne les comptes consolidés (publication du taux d’actualisation pondéré moyen, données sur les charges de sinistres et données quantitatives relatives à la procédure de liquidation des provisions pour prestations d’assurance);
- rapport sectoriel en tant qu’élément des comptes consolidés (référence à la Management Approach déjà appliquée dans la Swiss GAAP RPC 31);
- incongruences de l’approche de l’évaluation des provisions techniques et de l’évaluation de l’actif («Accounting Mismatch»)
- par le formulaire de site Web suivant: www.fer.ch/fr/projets/presentation-des-comptes-pour-compagnies-dassurance/
- par e-mail: fachsekretaer@fer.ch ou
- par la Poste: Fondation pour les recommandations relatives à la présentation des comptes, Tigerbergstrasse 9, 9000 Saint-Gall
Pour des raisons de transparence, la Commission envisage de publier, au terme du processus, les prises de position reçues concernant les questions de la consultation sur le site des Swiss GAAP RPC, dans la mesure où ceci n’est pas expressément refusé.
Le projet de remaniement de la Swiss GAAP RPC 14 représente, aussi pour l’avenir, pour les compagnies d’assurance à rayonnement national, un référentiel pour l’établissement des états financiers axé sur des principes. D’une part, le projet s’intègre dans le plan conceptuel de la structure modulaire évoluée des Swiss GAAP RPC, d’autre part, il met en œuvre de manière équilibrée les exigences accrues en matière de transparence des états financiers, tout en servant les intérêts de toutes les parties prenantes. Ainsi, dans les questions d’évaluation, les entreprises d’assurance peuvent continuer à utiliser des synergies dans l’établissement des états financiers, en s’appuyant sur les dispositions relevant du droit de la surveillance. En même temps, il est tenu compte de manière appropriée des demandes légitimes d’information des investisseurs et d’autres groupes d’intérêts grâce à des dispositions de publication élargies, comme l’indication obligatoire des méthodes appliquées et des modèles utilisés pour l’évaluation des provisions techniques ou les dispositions complémentaires dans le compte de résultat concernant les données sur les taux d’actualisation, les charges de sinistres et la procédure de liquidation.
(Prof. Dr Reto Eberle, responsable du groupe de travail présentation des comptes des compagnies d’assurance, Andrea Mitterlechner, collaboratrice du projet présentation des comptes des compagnies d’assurance, Lukas Reichel, collaborateur du projet présentation des comptes des compagnies d’assurance, 12.12.2017, Zürich)
- Cette contribution fait partie du projet soumis à consultation de la RPC et paraît donc simultanément dans Expert Focus 1 – 2/2018.
- Le projet remanié prévoit un changement de dénomination de l’ancienne Swiss GAAP RPC 14 «Comptes consolidés des compagnies d’assurance» en Swiss GAAP RPC 14 «Présentation des comptes des compagnies d’assurance».
- Selon l’art. 962 al. 1 du code des obligations.
- Voir ONCR 221.432 du 21 novembre 2012.
- Dans le remaniement de la Swiss GAAP RPC 14, le terme de «tableau de financement» utilisé jusque-là a été remplacé par «tableau de flux de trésorerie».
- À condition que la variation de valeur ne soit pas imputable à un crédit mais due par exemple à une variation du niveau des taux d’intérêts (voir section sur les placements de capitaux).